Les Programmations

Vasarely n’a jamais fait secret quant à la réalisation de ses œuvres, relevant de la dextérité et de l’application rigoureuse de la programmation confiée.

Art programmé, art codifié qui ont fait déclarer par la presse au décès de l’artiste : « le père de l’informatique nous a quittés ».

Seul, enfermé à clé dans son atelier personnel, que de fois l’ai-je observé devant sa feuille de papier Canson et sa boite de crayons de couleurs Caran d’Ache, dans un silence pénétrant, tracer les formes de l’œuvre à venir, puis comme par magie, dans un jaillissement, la couvrir de chiffres accompagnés de la lettre indiquant la couleur.

Graduation de gammes minutieusement échelonnées par lui-même, c’est dans cette gestuelle rapide et précise que la pulsion créatrice chez lui s’exprimait.

Le codage terminé, son visage s’illuminait. Pour lui, l’œuvre était terminée. Si le résultat était concluant, ce thème était réalisé en grand format.

L’exécution en elle-même n’impliquait aucune création, seulement l’application de ses concepts visionnaires, expression disait-il souvent de l’infiniment petit à l’infiniment grand, de l’atome au cosmos. 

Ces programmations sont la matière constitutionnelle de l’œuvre, perception de cette vie éternelle dont l’infini chez lui tournait à l’obsession. Il résumait cette formule inconnue, composante de l’univers, au travers d’une certitude mathématique, qu’il tenta, par l’intermédiaire de ses œuvres, de rendre perméable au cerveau humain, mélodie esthétique reconnaissable et accessible, mettant en exergue un infini abstrait et codifié.

Alors que la technologie n’avait pas encore surgi dans notre quotidien, ses programmes s’apparentent à ceux de l’intelligence artificielle mais ce fut cet esprit novateur et précurseur qui en a été le pionnier. 

Michèle Vasarely